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PETITE HISTOIRE D'UNE GRANDE ILE

  1. La découverte
  2. Sucre, tabac,... esclaves
  3. L'indépendance
  4. La domination étatsunienne
  5. Cuba sous F. Batista
  6. La révolution cubaine
  7. La Baie des Cochons
  8. Renforcement du blocus Etatsunien
  9. Et maintenant?
croix colomb
Croix dite  de Christophe Colomb
(Baracoa)

La découverte

1492: Christophe Colomb découvre Cuba : "Jamais homme ne vit une terre plus belle".
L'île était déjà peuplée par plus de 100 000 autochtones, pour la plupart des Taïnos ou des Karibs. Le gouverneur Diego Velázquez de Cuéllar fonde les villes de Santiago de Cuba (1514) et de La Havane (1519) mais organise avec ses hommes le pillage du territoire. Ils réduisirent les indigènes en esclavage; en moins de dix ans, de 1511 à 1520, la population autochtone est décimée, résistant mal aux nouvelles maladies et au travail imposé.

 


Statue hommage aux indiens Taïnos

Sucre, tabac,... esclaves

L'économie de Cuba reposa alors sur les plantations de canne à sucre, de tabac et de café. Pour faire face aux besoins de main d'œuvre, des milliers d'esclaves africains furent importés; entre 1600 et 1800, on estime leur nombre à près de 800 000, dont bon nombre de Yorubas (Ouest du Nigéria), de Bantous, et de multiples ethnies du Zaïre, Bénin, Ghana, Togo, Sénégal, Angola, Libéria... (voir l'ouvrage des "anneaux de la mémoire"). La domination espagnole perdit de son influence dès le XVIIe siècle, quand la France, l'Angleterre et la Hollande disputaient à l'Espagne ses conquêtes d'outremer. C'était le temps des corsaires, des pirates et de la contrebande. En 1762, les Anglais occupèrent La Havane ; en moins d'un an d'occupation, le port reçut plus de mille embarcations qui établirent un vaste commerce avec les Treize Colonies nord-américaines, plus de 10 000 esclaves furent importés pour donner un élan à l'industrie sucrière. La Havane fut alors récupérée en 1762 en échange de la Péninsule de la Floride, découverte par l'Espagne au XVIe siècle. L'économie cubaine se concentra sur l'agriculture (bétail, canne à sucre, café et tabac) et connut un développement économique important; les produits cubains profitèrent sur les marchés européens de la ruine des plantations françaises de Saint-Domingue suite à la révolution haïtienne (1791-1793). La population passa de moins de 300 000 en 1791 à plus d'un million en 1840. En 1825, la répartition était la suivante:

1825 blancs: 46% non-Européens libres: 18% esclaves: 36%
actuellement blancs: 37% métis: 51% noirs: 11%

Au cours du XIXe siècle, le "criollo" (espagnol né à Cuba) s'éloignait de l'Espagne et de l'autorité de la métropole.C'est ainsi qu'un sentiment nationaliste apparut, qui allait aboutir à l'indépendance

interieur colonial
maison coloniale (Trinidad)

esclaves canne a sucre
esclaves ramassant la canne à sucre

cespedes
Manuel de Cespedes


Jose Marti
(doc. centre Ernesto Che Guevara)

L'indépendance

Le 10 octobre 1868, Carlos Manuel de Cespedes (1819-1874), riche propriétaire terrien, libère ses esclaves et fonde une armée: ce fut le début de la "Guerra de los Diez Años" (Guerre des Dix Ans :1868-1878). Elle se solda par un échec, malgré le soutien des États-Unis d'Amérique et de nombreux vétérans de la Guerre de Sécession. Le pacte de Zanjón (10 février 1878) accorda toutefois une certaine autonomie, l’abolition de l’esclavage (1880, mise en pratique en 1886) et l’égalité des droits entre Blancs et Noirs (1893).

José Martí, écrivain et patriote, figure essentielle de l'histoire cubaine, fonde le Parti révolutionnaire cubain en 1891 avec les futurs généraux, Máximo Gómez et Antonio Maceo. La guerre révolutionnaire d’indépendance débute le 29 janvier 1895. L’Espagne envoie 280000 soldats en renfort: l'île compte 1 soldat pour 6 habitants!

L'affaire du "Maine": Le président Américain de l’époque, William McKinley, décide alors d'envoyer à La Havane un navire de guerre, le Maine, afin d’y protéger les intérêts de Washington.Dans la nuit du 15 février 1898, le croiseur explose dans le port de La Havane pour des raisons encore inconnues (pour nombre d'historiens, il s'agit d'un auto-sabotage permettant l'intervention américaine à Cuba) : 250 marins meurent sur le coup. L'intervention de Washington fut rapide, se soldant par la reddition de l'armée espagnole mais refusant de reconnaître le Gouvernement de la République Armée Cubaine. Le traité de Paris du 10 décembre 1898 installe un gouvernement militaire d'occupation par les États-Unis. Ces derniers reçurent ainsi le contrôle absolu de Cuba, Puerto Rico et les Philippines

La domination étatsunienne

En 1901, le Sénat et la Chambre de Représentants des Etats Unis approuvèrent l'amendement Platt, qui reconnaissait la "souveraineté" cubaine, mais qui autorisait aussi le gouvernement nord-américain à intervenir à tout moment ; par ailleurs, établissait que le gouvernement cubain devait louer aux Etats Unis " les terres nécessaires pour des stations navales et des mines à houille (?) dans certains points de l'île que l'on déterminerait avec le président des Etats Unis". Cet amendement offre ainsi aux États-Unis les bases navales de Guantanamo et Bahía Honda et transforme l'île en néo-colonie. Les Américains contrôleront ainsi une grande partie de l’économie et de la classe politique jusqu’en 1959. Quatre interventions militaires américaines auront lieu en 1906, 1909, 1917 et 1919 afin de réprimer des insurrections populaires, à la demande du premier président de Cuba, Tomás Estra da Palma. La monoculture du sucre engendre une dépendance grandissante à l’égard des USA contribuant à la montée du mécontentement populaire, amenant ainsi l’apparition des premiers syndicats nationaux et de mouvements d'opposition (la "FEU", Federación Estudiantil Universitaria en 1922 de Julio Antonio Mella, marxiste et leader "martiano", i.e. de Martí; a Ligue Anti-Impérialiste, l'Université Populaire "José Martí", en 25 la Confédération Ouvrière de Cuba et le Parti Communiste fondé par Julio Antonio Mella et le socialiste Carlos Baliño...) La crise de 1929 provoque un chômage massif ; la dictature de Gerardo Machado (1925-1933) tente de paralyser les luttes ouvrières, mais les difficultés économiques de l’époque font crouler son administration. Le président Grau San Martín réalise quelques réformes sociales, mais son gouvernement n’est pas reconnu par Washington et ne dure que quatre mois.

guantanamo carte
guantanamo bay base de Guantanamo
batista
F. Batista

bodeguita
La "Bodeguita del medio",
le bar favori d'E. Hemingway

Cuba sous F. Batista

Appuyé par les États-Unis, un groupe de l’armée s’empare du pouvoir avec à sa tête le général Fulgencio Batista. Sous les pressions populaires, les USA révoquent l’amendement Platt, conservant toutefois leur base navale de Guantanamo. L’économie continue de s’effondrer, dans un climat de violences politiques Batista reprend les rênes du pouvoir. Son coup d’État met fin à la constitution, les partis politiques sont proscrits, la corruption est portée à son degré le plus élevé, la répression et le pillage atteignent un paroxysme.
La population souffre, notamment les noirs et les habitants de la campagne. Il y a deux cent mille familles de paysans qui n’ont pas un centimètre de terrain où semer quelque chose pour nourrir leurs enfants sous-alimentés alors que plus de la moitié des meilleures terres productives sont aux mains des étrangers. Le pays compte, par ailleurs, 500 000 paysans, surexploités pendant quatre mois par an et chômeurs pendant le reste de l’année. De plus, 85 % des petits agriculteurs cubains paient un loyer et vivent sous la menace constante de se voir expulser de leurs parcelles et 45% de la population est analphabète. Les écoles et les hôpitaux sont souvent absents des campagnes. Les cubains doivent encaisser les durs maux d’un capitaliste aveugle tels un fort chômage saisonnier et de grands écarts entre les classes et les régions.
Les entreprises américaines dominent tout le spectre de l’activité économique dans l’île, faisant de Cuba un appendice des États-Unis. Ils contrôlent 90% de l’industrie du sucre, 80% des services publics, 50% des chemins de fer et la totalité des ressources pétrolières. Près de 44% des terres appartiennent à des Américains. Cuba est alors une véritable République bananière, influencée par les intérêts étrangers et commerciaux de plusieurs grandes entreprises dont la United Fruit Company.
À La Havane l’industrie du vice se développe. La ville devient la capitale latino-américaine de la prostitution et les touristes américains y affluent, d’où son surnom de « bordel de l’Amérique ».

La révolution cubaine

Le 26 juillet 1953 un groupe de jeunes avec Fidel Castro à leur tête, attaqua la caserne de "La Moncada" à Santiago de Cuba avec pour objectif d'armer le peuple et de lancer une insurrection générale. L'assaut se termina en déroute mais permit à Fidel Castro de se distinguer en tant que le leader de la future révolution.

Fidel Castro et les survivants furent condamnés à la prison dans l'île de "Pinos" (aujourd'hui " Isla de la Juventud" ou île de la jeunesse). Après un important mouvement populaire, les prisonniers furent amnistiés, ils s'exilèrent au Mexique en 1955. En exil, Fidel Castro réorganisa ses camarades et des compagnons de route avec parmi eux l'Argentin Ernesto "Che" Guevara. A bord du yacht "Granma" ils débarquèrent le 2 décembre 1956 sur les plages "Las Coloradas"dans la région Orientale et lancèrent la guerilla dans les montagnes de la "Sierra Maestra". Petit à petit, les "barbudos", dont le célèbre Camilo Cienfuegos, emportèrent l'adhésion populaire.

Le 1er janvier 1959, le dictateur Fulgencio Batista est définitivement renversé par les forces révolutionnaires et quitte Cuba. La Révolution Cubaine avait triomphé.

La réforme agraire de 1959 redistribue les terres aux paysans pauvres etchasse des compagnies étasuniennes, dont United Fruit Co.

Le 21 octobre 1959, les États-Unis envoient 2 avions sur Cuba. Ces avions mènent une attaque sur La Havane, font 2 morts et 50 blessés.

28 décembre 1958 à Santa Clara
che guevara
Les révolutionnaires, conduits par Che Guevara, s'emparent grâce à un bulldozer d'un train blindé rempli de munitions.

santa clara bulldozer
Les jours suivants, l'armée de Batista se rend


musée de Playa Giron
Sur la crise des missiles,
lire cet article du Monde Diplomatique

bloqueo
Refus de l'embargo américain!
"No al bloqueo"

La Baie des Cochons

Entre le 17 et le 21 avril 1961, 1500 cubains réfugiés aux États-Unis, entraînés et payés par la CIA dans un camp au Guatemala, tentent d'envahir l'île en débarquant à la Baie des cochons (Playa Giron) : échec total, tous les envahisseurs furent tués ou fait prisonniers.

Dès les années 1960, Cuba soutint de facon plus ou moins officielle des mouvements de guérilla en Amérique Latine et en Afrique. Cuba envoya en 1975 des conseillers militaires au MPLA (Mouvement Populaire de Libération de l'Angola) qui avait prit le pouvoir en Angola lors de son indépendance; il y aura jusqu'à 50 000 hommes en permanence.

Renforcement du blocus Etatsunien

La chute de l'URSS entraina le pays dans une grave crise économique ; le gouvernement des USA profita de ces difficultés pour reprendre en 1990 une nouvelle phase du blocus économique contre Cuba. Les législateurs de Floride présentèrent des projets de loi au Congrès, dans le but d'interrompre les transactions entre les filiales des transnationales et Cuba ; ils prétendaient en plus sanctionner les bateaux qui transportaient des marchandises ou des passagers à Cuba : les bateaux devaient passer au moins 180 jours sans toucher un port Etasunien.

En 1992 le président Georges Bush signa la Loi Torricelli et en 1997 en continuité de cette politique, on renforça le chapitre II de la loi Helms-Burton. Depuis le moment même de son approbation, Washington n'a jamais lésiné pour obtenir l'acceptation internationale de cette loi, en essayant d'annexer l'approbation de l'Union européenne et autres alliés à sa politique, contre Cuba. Depuis quelques années, des liens de coopération sont établis avec le Brésil de Luís Inácio da Silva (Lula) et surtout le Venezuela d'Hugo Chávez. Ce dernier reverse une partie de ses resources pétrolières à Cuba en échange d'aides en matière de médecine et d'éducation, domaines où l'excellence cubaine est internationalement reconnue.

Et maintenant?

Le Pdt Obama a fait un premier pas vers une normalisation des relations entre Cuba et les USA. Des ambasades réouvrent. Mais le chemin reste long: la fin de l'embargo, la restitution de la baie de Guantanamo, etc. Que feront les assemblées étatsuniennes? La population cubaine est méfiante, craignant une arrivée massive sur l'île, créatrice d'inflation tant sur les denrées de base que sur l'immobilier... LA prudence s'impose.